N°134

Culture

« Concérence »

Entretien avec Olivier Daviet

Propos recueillis par Abdellatif CHAOUITE, Farid RIGHI

Olivier Daviet est psychologue clinicien, formateur et musicien.
Il a créé dernièrement un «  spectacle  », Concérence, une expression au croisement du «  politique, sciences humaines, éducation populaire, pratiques soignantes et art comme voie royale pour partager la complexité  ».

E. I.  : Olivier Daviet, vous êtes psychologue et... comment dire, artiste  ? Chansonnier  ? Musicien  ?... En tout cas un «  bricoleur  » (au bon sens du terme) ou un artisan des mots et des notes. Profil doublé encore d’un engagement sensible aux «  causes  » sociales et notamment celles des dits «  étrangers  » et d’un voyageur à vélo bien loin de votre terre natale (voyage que avez raconté dans un livre (Des roues sur les chemins de la soie, en ligne chez Bibliocratie.org).
Pouvez-vous vous présenter en nous disant comment ces «  tentations  » ou ces «  vocations  » ont tracé leurs chemins dans votre expérience  ?

Olivier Daviet  : Comme je le raconte dans la Concérence (cette partie-là est très autobiographique), ça a commencé par les voyages, assez jeune, dont cette jolie expérience de traversée de l’Europe et de la Turquie à vélo. L’appétit des autres, a fortiori s’ils étaient différents, s’est révélé assez spontané. C’est comme ça que je me suis retrouvé aimanté, dans mes études de psychologie, par la clinique de l’exil. Là, ça a été la douche froide  : le «  traitement social de l’étranger  » était assez éloigné de cette «  fraternité par défaut  » qu’on nous enseignait aussi bien à l’école républicaine qu’aux scouts ! C’est à partir de ces désillusions que la chanson et la fréquentation de personnes venues d’ailleurs sont entrées en collusion. J’écoutais beaucoup de chansons francophones (je crois que ça a été un art majeur dans ma construction), j’en chantais et je jouais de la musique par ailleurs. J’ai franchi le pas en osant en écrire une première, tout simplement parce que j’en avais besoin... A l’époque, je travaillais quelques heures par semaine dans un Centre d’Accueil pour Demandeurs d’Asile. L’injustice et l’impuissance me faisaient tellement bouillir, l’indifférence commune et le soupçon envers ces personnes qui revenaient parfois de l’enfer me semblaient tellement incompréhensibles que j’ai opté pour le cynisme  ! C’était à l’époque de Sarkozy qui a inauguré je crois le retour officiel de la xénophobie au sommet de l’État... Celle aussi où les partis néofascistes polluaient sérieusement les urnes alors qu’on manifestait, effarés, à la fin des années 90, quand le FN dépassait les 10 %  ! J’ai écrit la seule composition qui se trouve dans le spectacle (les autres sont des reprises) à partir de ce que j’imaginais qu’un fonctionnaire de la Police de l’Air et des Frontières aurait voulu adresser aux réfugiés qu’il envoyait en Centre de Rétention Administrative...
Voilà pour la partie consciente... Sur la partie qui l’est moins, quelques années de divan et de cheminement personnel m’ont aidé à identifier certaines racines de mon intérêt pour ces sujets et de mon empathie envers les personnes exilées. J’avais besoin d’y voir clair parce que la migration internationale s’avère totalement absente de mon héritage familial  ! Mais, peut-être que la migration régionale d’un grand-père, en temps de guerre, des identités et des appartenances en souffrance, le mythe d’un paradis perdu... participent de cette part «  exilée  »... Mais tout ça est encore au travail et fera peut-être l’objet d’un prochain spectacle  !...

E. I.  : Un «  trait  » ou un attrait traverse les différentes facettes de votre expérience  : la notion d’interculturel. Elle est présente dans votre travail professionnel, notamment à travers l’association que vous avez contribué à fonder, «  le Caméléon  » à Grenoble, qui propose différents services aux acteurs et structures sur l’agglomération grenobloise qui accompagnent les étrangers. Comment entendez-vous cette notion et comment la traduisez-vous en termes pratiques dans les activités que propose le Caméléon  ?
O.D.  : En fait, j’ai rejoint des collègues et amis qui avaient fondé cette belle association qu’est le Caméléon (dont le nom est un hommage à Romain Gary). L’idée première est d’offrir du soin en santé mentale pour des personnes exilées, qui peinent à être entendues, en général bien sûr, mais en particulier dans le cadre d’une relation thérapeutique... Le délabrement de l’offre publique de soins, rongée par les politiques néolibérales et les spécificités du travail auprès de ce public, font que beaucoup de personnes très en souffrance n’ont pas accès aux soins. Pourtant, les raisons ne manquent pas, entre la précarité de leur situation en France, l’incertitude liée aux politiques migratoires, les persécutions subies au pays ou pendant le voyage, l’épreuve de l’exil... Nous les accueillons en séances individuelles ou en groupe, principalement psychocorporelles. Comme notre action est très modeste par rapport aux besoins, nous participons aussi à équiper et épauler les acteurs de première ligne, professionnels du social et du soin et bénévoles associatifs, par de l’accompagnement aux pratiques et de la formation.
Au Caméléon, on croise de l’interculturel un peu partout... Déjà, évidemment, en travaillant avec des personnes pour qui les notions de psychisme, de souffrance et de soin en santé mentale diffèrent de celles communément acceptées ici (même si les divergences sont nombreuses, ici comme ailleurs, sur des sujets aussi complexes...). Le travail avec un interprète, quand la matière principale est justement le langage, constitue en soi un écart... technique mais aussi un véritable bouleversement du dispositif thérapeutique. Cela oblige, entre autres, le thérapeute à sortir de sa zone de confort pour une coopération étroite avec un collègue d’une autre discipline, qui s’avère souvent appartenir à la même communauté (au moins linguistique) que le patient... Le psy se retrouve alors lui-même en situation d’étranger  ! L’interculturel disciplinaire est aussi à la base de l’association puisqu’elle a été fondée par des psychologues et une psychomotricienne. Pour cette raison et parce que les tableaux somatiques sont monnaie courante chez les personnes migrantes, le dialogue corps/esprit anime nombre de nos discussions et remodèle nos manières de travailler. Enfin, on ne peut pas penser le soin auprès de personnes qui se retrouvent au croisement de problématiques multiples (sociale, juridique, psy, somatique, linguistique, géopolitique, etc.) sans accorder au partenariat, donc au dialogue et à l’ajustement, une place majeure. Comme toutes les pratiques psycho-sociales, celles du Caméléon nous invitent à un redéploiement des places, des rôles, des fonctionnements comme l’ont compris avant les autres les amis de l’ORSPERE (Observatoire Régional sur la Souffrance Psychique en rapport avec l’Exclusion, basé à Lyon).
Dans nos pratiques au Caméléon, on marche continuellement sur un fil entre, d’un côté, une adaptation, un assouplissement, une créativité dans nos manières d’accompagner et, de l’autre, l’ancrage dans une éthique et des repères théorico-cliniques. On dialogue et on digresse beaucoup... Ça n’est pas toujours immédiatement «  efficace  », mais déployer les ailes de la pensée nous aide à lutter contre l’effet de suffocation et celui de l’avalanche des mauvaises nouvelles sociétales...

E. I.  : Vous l’avez également traduite, en coréalisation avec le collectif Entre Autres, dans une performance que l’on ne sait pas comment qualifier  : artistique  ? pédagogique  ? interdisciplinaire  ?... Vous l’avez intitulée en tout cas Concérence, un mixte de concert et de conférence sur l’interculturel et un bel outil qui mérite de figurer dans toutes les mallettes pédagogiques sur cette question  ! Comment vous est venue cette idée et pourquoi et pour qui  ?
O.D.  : Dans l’après-coup, ce format de «  concérence  », qui mélange préoccupation politique, sciences humaines, éducation populaire, pratiques soignantes et art comme voie royale pour partager la complexité, m’est en fait apparu comme un rassemblement des pièces de mon puzzle intime  ! Je me suis en effet retrouvé très rapidement après l’Université à donner des formations sur ces thèmes, auprès de professionnels du soin, du travail social, de l’éducation populaire... Plus j’avançais et plus ça m’échappait. Plus j’essayais de construire un savoir sur un supposé Autre, plus ça me rapprochait des groupes en général, de nous, de moi... «  L’étranger te permet d’être toi-même en faisant de toi un étranger  » affirme Edmond Jabès. On me demandait un savoir «  ethnicisé  » et il me semblait indispensable de le déconstruire, pour chercher ailleurs, dans nos propres constructions identitaires et appartenances, dans les angles morts de nos héritages... Devant des personnes qui attendaient des réponses, cette invitation au décalage, parfois maladroite, m’a fait traverser de grands moments de solitude  ! J’ai mis du temps, en appui sur la pensée de bien d’autres, à construire un propos transmissible.
En parallèle, j’ai réalisé combien les questions d’appartenances, d’identité, de sans-papiers irriguaient la chanson francophone. J’en ai vite repéré un certain nombre  : de Le Forestier, évidemment «  né quelque part  », à Juliette qui a écrit une bouleversante ode aux «  étranges étrangers  », en passant par la poésie tonitruante de Christian Olivier ou celle de Loïc Lantoine... J’ai réuni des amis musiciens qui ont bien voulu travailler un répertoire sans être certains sur où cela nous mènerait... Aujourd’hui, Christophe Neyret, Oleg Sladkoff et Franck Hocquet construisent, avec leurs instruments et leur talent d’arrangeurs, un écrin pour les chansons et habillent le spectacle de nombreux effets. C‘est vivant comme un concert  ! La musique et la poésie invitent à la rêverie, à prêter attention aux échos des propositions plus théoriques en soi.
En parallèle, je suis allé voir Delphine Dubois-Fabing, metteuse en scène, comédienne et autrice avec mon texte de conférence. Nous l’avons ensemble fait évoluer vers un dialogue entre deux personnages, certes conférenciers, mais débordés par le rapport intime aux questions qu’ils traitent. Cela leur fait puiser de la force dans leur vulnérabilité et c’est un des moteurs pour entraîner le spectateur, limiter le jugement ou la culpabilisation... Nous nous prenons tous les pieds dans le tapis des questions appartenancielles, de loyauté et de trahison, d’effritement et de reconfiguration identitaires et partir de nos propres errances participe à limiter ce qu’on projette sur les autres. Il fallait essayer d’éviter le tableau manichéen, avec des gentils militants d’un côté et les racistes-bas-du-plafond de l’autre...
Ce spectacle se veut une petite contribution à la lutte contre l’obscurantisme et l’instrumentalisation de sujets passionnants, mais anxiogènes, à des fins électoralistes. Nous voulons le diffuser auprès d’un public le plus large possible  : ceux qui sont déjà sensibilisés à ces questions et ceux qui ne le sont que par la presse régionale ou les chaînes d’infos continues... On vise aussi les formations des professionnels les plus en contact avec les nouveaux arrivants sur notre sol, soignants, travailleurs sociaux... et pourquoi pas, agents des préfectures, policiers...!

E. I.  : Dans cette Concérence, vous passez au crible tout l’essaim des termes qui gravitent autour du terme interculturel  : identité, étranger, l’autre, la frontière, la relation, la mondialisation, etc. faisant ressortir à chaque fois leurs pertinences et leurs limites dans le contexte actuel ou leurs impasses. Au-delà, on comprend ou on devine qu’il y a dans cet imbroglio une question politique  ! Comment la formuleriez-vous  ?
O.D.  : J’ai d’abord cru/appris qu’une relation dite «  interculturelle  » était toujours un peu exotique et réunissait un «  comme moi  » et un «  étranger  ». Avant de comprendre que le «  comme moi  » m’était étranger à bien des égards et que «  l’autre étranger  » pouvait m’apparaître au contraire bien familier sur d’autres aspects  ! Toute relation me semble aujourd’hui fondamentalement interculturelle, parce que ce qui rend chaque individu unique, c’est d’être au croisement de plusieurs cultures (familiales, religieuses, de classe sociale, générationnelle, etc.). Les questions d’appartenance sont par ailleurs à l’origine de bien des quiproquos, conflits et autres passions... et, pour autant, nous sommes structurellement condamnés à appartenir  : même si les identités peuvent être «  meurtrières  » (comme le suggérait A. Maalouf), le substrat groupal des individus est vital  ! Ça confine au paradoxe... C’est sans doute autour de ce paradoxe que se tricote le politique, et l’interculturel en devient un des noms  : réglage entre les subjectivités, ajustements à l’intérieur et entre les groupes, communautés et éclosions subjectives. Il me semble d’ailleurs que la question de l’articulation du sujet et de ses groupes figure parmi les constituants majeurs des bouleversements anthropologiques contemporains  : démocratie et participation des citoyens, appartenance à un genre ou un autre, réinvention de «  garants méta-sociaux  » (R. Kaës) entre épanouissement individuel et coopération, etc...
Ça ne colle pas toujours avec un air du temps qui promeut beaucoup les défenses obsessionnelles (à travers le culte des chiffres par exemple), mais les «  outils  » de l’interculturalité nous invitent à penser les processus plutôt que les catégories. Le processuel, c’est ce qui échappe parce que c’est vivant (comme les Furtifs du dernier roman d’Alain Damasio). La place de l’étranger en est presque une allégorie  : elle peut être pensée comme statique (l’étranger est un futur «  assimilé  » ou bien il n’a même pas à être) ou alors l’étranger peut se révéler, pour celui qui est «  déjà là  », à la fois miroir, poil à gratter, cadeau, dérangement, distorsion... et provocateur de changement. De même que la culture est dynamique (contrairement à la tradition), l’interculturel est un processus qui transforme l’ensemble des parties en présence. Tous ces ruisseaux irriguent le fleuve de la vie en commun, donc du politique...

E. I.  : Quels sont les points saillants dans votre expérience de clinicien qui révèlent cette question politique  ? Ou, comment les dires, que ce soit des étrangers ou des professionnel.les qui les accompagnent peuvent éclairer cette question sans la rabattre tout simplement sur les sujets concernés  ? Ou encore, quelles sont les failles que vous repérez (sur le plan du droit ou de son application par exemple) qui «  dé-faussent  » politiquement cette question  ?
O. D.  : J’aime bien penser que ceux qui passent les frontières nous conduisent à dépasser les nôtres  ! Qu’elles soient disciplinaires, institutionnelles, cliniques, familiales... Les acteurs de première ligne auprès des «  publics migrants  » semblent invités/condamnés au mouvement. Pas seulement parce qu’ils sont «  remués  » par les situations des gens qu’ils rencontrent, mais aussi parce que ces rencontres les transforment parfois profondément. Ça n’est plus une illusion internationaliste  : nous appartenons tous à une même espèce. A l’échelle du monde, si les écarts se creusent (en termes d’accès aux ressources par exemple), certaines passerelles identificatoires se solidifient je crois (les voyages, Internet, la plus facile fréquentation de personnes venues d’ailleurs, les consommations de masse aussi  : tout cela y contribue). Une fois qu’on a réalisé, matérialisé, digéré, vécu dans ses tripes que nous sommes une entité humaine, que chaque habitant.e du monde pourrait être notre voisin.e, notre collègue d’université, un.e ami.e de nos enfants... ça devient plus difficile de tolérer qu’à l’autre bout du monde des quasi esclaves risquent leur vie dans des mines de pierres précieuses à l’autre bout du monde pour que nos doigts brillent ici ou qu’ils dorment sur nos bancs publics après avoir survécu à la traversée de la Méditerranée... C’est à un vaste mouvement d’identification que tout cela participe  !
Or, j’ai l’impression de rencontrer des gens, tant du côté des accompagnateurs que des bénéficiaires, hagards, sidérés, parfois entravés dans leur capacité de penser, voire de ressentir. Ce à quoi se heurtent ceux qu’on appelle les migrants ou, à moindre mesure, ceux qui se penchent à leur chevet, c’est à une négligence de la société (comme dans certaines pathologies neurologiques où une partie du champ visuel n’est simplement pas perçue, alors que l’œil fonctionne bien). Ils se retrouvent passés sous silence, invisibilisés, rayés de la carte sociale malgré toute la vitalité dont ils ont fait preuve pour arriver jusqu’à nous. J’ai parfois l’impression que l’enjeu est moins celui de la présence de ces personnes sur «  notre  » sol que celui de notre (in)capacité à penser collectivement notre contemporanéité et ce fonctionnement mondialisé où tout circule, sauf les humains du sud vers les pays du nord. En réduisant ces personnes à des «  sans  » (papiers et plein d’autres choses), on se débarrasse à assez peu de frais des questions politiques voire existentielles qu’elles incarnent. Les migrants le subissent, les accompagnateurs en sont les témoins sidérés et le reste du monde change de chaîne...
Comment rester sujet – a fortiori quand on est survivant à des persécutions et symboliquement déshabillé par l’exil – quand seule une forme d’inexistence nous est offerte  ?
Un exemple, celui des Mineurs Non Accompagnés dont le statut d’enfant ou d’adultes perd tout enjeu symbolique pour se trouver écrasé par le réel des stratégies administratives  : la leur étant de se placer sous la protection de la société en tant qu’enfant, celle de l’administration de les en exclure pour ne pas creuser les déficits publics ou risquer le fameux «  appel d’air  ». Ces jeunes, qui vont rester pour la plupart sur notre sol et devenir nos voisins, auront ainsi vu leur entrée dans le monde adulte sacrifiée sur l’autel des politiques migratoires.

E. I.  : Une dernière question et qui n’est pas seulement de circonstance  : l’expérience de «  confinement  » ou d’assignation à résidence que nous vivons actuellement et à l’échelle quasi-mondiale, que pourrait-elle révéler sur la double question de l’interculturel  : la liberté de circulation d’une part et la responsabilité de la relation d’autre part  ?
O.D.  : La mondialisation est un fait indépassable, concrétisée aujourd’hui par cette pandémie, demain par la catastrophe climatique. Ce village global porte le meilleur et le pire en son sein, de la mise en commun des avancées scientifiques contre les virus aux spéculations de Wall Street sur les émeutes de la faim en Afrique. Cette extrême interdépendance dans laquelle nous nous trouvons au niveau mondial devra diminuer au niveau de la production industrielle et l’agriculture, mais elle doit se transformer en force dans la lutte contre le réchauffement climatique  : même si nous n’en subirons pas tous les mêmes conséquences, nous avons hélas tous le même dossier sur le sommet de nos piles  ! La notion même d’«  État-nation  » paraît tellement dérisoire face aux dérèglements de la Terre  ! On croirait des fourmis qui prennent le temps de s’engueuler alors qu’une grosse godasse va les écraser  !
Interdépendance mondiale donc et, dans le même temps, apparaît l’indispensable investissement du territoire comme support de résilience face aux crises. Loin du repli nationaliste, le territoire met à l’épreuve nos représentations a priori sur l’autre  : il est moins question de celui ou celle qui a la légitimité d’en être que de composer avec ceux qui sont là, avec nous, simplement parce qu’ils sont là. J’ai l’impression que les initiatives de solidarité qui se sont construites lors de cette crise où la circulation était très réduite et dans cet environnement contraint ont toutes dû créer à partir des ressources du territoire et de ceux qui en font partie.
Alors oui, contre toutes les tentations au recroquevillement qui nous guettent, la fluidité est de mise, et il va falloir, pas à pas, continuer à composer nos partitions humaines...

Propos recueillis par Farid Righi et Abdellatif Chaouite