Depuis le tournant « intégration »/« lutte contre les discriminations », en gros au début des années 2000, il fallait une revue LCD. Elle existe désormais avec ces Cahiers qui visent, « à l’interface des compétences académiques et professionnelles », « à rassembler les connaissances et enrichir la réflexion et l’action autour des questions liées à la lutte contre les discriminations ». Autant donc à « traiter » ces dernières qu’à « lutter » contre. Une belle initiative coordonnée par Arnaud Alessandrin (docteur en sociologie) et Johanna Dagorn (docteure en Sciences de l’Éducation) dont la première livraison a été consacrée à La ville face aux discriminations.
La présente (la deuxième) est consacrée à École, migrations, discriminations, un triplet qui n’est pas donné gagnant tant son attelage premier (école-discrimination) oscille déjà entre une idéalité de justice libérale et une réalité d’élitisme républicain, et plus fort encore en tant que triplet : « En France, les ségrégations scolaires sont particulièrement télescopées aux ségrégations ethno-raciales ». Toutes les enquêtes le constatent et le confirment, il y a un « clair désavantage des élèves issus de l’immigration ou potentiellement associés à l’étrangeté du fait d’une racialisation », et particulièrement « ceux, originaires de la Caraïbe, d’Afrique ou de Turquie et/ou de confession musulmane ». Pour comprendre comment cela se fait, se fabrique et marche, il faudra tenir compte de beaucoup de facteurs enchevêtrés dans la réalité sociale et pas toujours lisibles ni visibles, autant dire piégeants : effets de contextes, effets de catégorisations, effets de réinterprétations selon les acteurs, effets de sélection, effets institutionnels, etc. Les différents articles qui composent le dossier sur cette question apportent des éclairages complémentaires et fort utiles pour tout acteur de la lutte contre les discriminations.

Abdellatif Chaouite